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De Treffieux à Ancenis

21 avril 2015

Treffieux (44), départ 5h30.

5h30, c’est le départ, dans la pénombre, le ciel est étoilé. Le relatif silence de la nuit disparaît avec les oiseaux, les grenouilles, les canards, les coqs. Sur la route, peu de monde, mais vers 6h des cars de ramassage scolaire et le coucou dans le lointain. Les lumières des maisons s’allument peu à peu, également celles des éoliennes et lignes à haute tension qui clignotent comme des sapins de Noël. C’est magique, ceux qui se lèvent tard ne connaissent pas ces moments, entre chien et loup, dommage pour eux. La brume monte et s’étale dans les champs couverts, ce matin, d’une abondante rosée. J’arrive à Abbaretz vers 6h45, direction la pâtisserie, puis le bar pour prendre un petit déjeuner bien chaud.

Un petit bonjour et un grand merci à Guillotin de Corson

Un petit tour au cimetière sur la tombe de la famille de Guillotin de Corson, un monument. A travers la porte vitrée, je ne vois pas de plaque nominative pour le chanoine Amédée Guillotin de Corson. Aurait-il une tombe individuelle ? A rechercher. Abbaretz est connu pour son site « la mine d’étain », il y a un imposant terril aménagé pour la visite.

Quelle technique pour sortir de telles plaques de schiste

Pour rejoindre Joué-sur-Erdre, une petite route fort agréable. Au lieu-dit Gachard, une soue à cochons est édifiée avec de superbes plaques de schiste bleu. Les petites haies de bordures ont été coupées, ou plutôt hachées par des épareuses, ces engins qui broient, déchirent, déchiquettent. Un massacre. Ah, où est l’époque des employés de commune qui taillaient les haies avec une serpe, un croissant ou autre outil tranchant. Au moins les branches étaient bien coupées. Quelques clôtures de dalles de schiste. Il y en a partout, c’est vraiment un élément identitaire de la région, mais pas du tout valorisé. Les personnes que je rencontre trouvent mon aventure « courageuse », me souhaitent « bonne route ». Admiration, envie, crainte, un mélange de sentiments. De plus en plus, je parle à mes pieds, à haute voix, dans cette solitude. Inquiétant ? Je les rassure, leur dit que je vais bientôt m’arrêter, qu’ils vont pouvoir respirer, se détendre, que je cherche l’endroit approprié pour la pause, un emplacement à l’ombre, si possible. J’installe ma grande bâche au sol et je pose tout dessus, afin de ne rien oublier au départ. C’est toujours une de mes craintes. Je leur parle, comme mamie à son petit chat. Après trois jours, les frottements entre pieds, chaussettes, chaussures, commencent à faire leurs effets. Les échauffements sont là.

Au pignon d’une maison, imposant et étonnant

Je pense alors au cellofrais qui emballait mon sandwich. Il peut faire l’affaire. J’enveloppe donc mes doigts de pied de cellofrais afin qu’ils ne soient plus en contact les uns avec les autres. J’ai l’impression que cela ne leur plait pas. Ils ne peuvent plus communiquer, se frotter les uns aux autres. Cependant je constate vite que c’est efficace. Plus d’irritations. Avec Cellofrais, la fraîcheur, à peu de frais ! Mieux que la pommade. Une relation particulière s’installe entre moi et mes pieds. C’est vrai que je les bichonne comme rarement je l’ai fait. Massages, trempettes dans l’eau claire des ruisseaux, chaussettes spéciales marche, exposition au vent frais et au soleil, mais sans excès. Les veinards. Pas tant que cela, 30 kilomètres par jour, il faut se les avaler. Mais on n’a rien sans rien. On s’y attache, une vraie amitié s’est installée, on ne se quitte plus. Petite pause à Notre-Dame-de-Langueurs, étonnant comme nom.

L’Erdre nonchalante en bas de la ville

Il est 12 heures, Joué-sur-Erdre est en vue, j’arrive par la rivière, son moulin, ses ponts, tout cela est rafraîchissant. Au restaurant, joues de bœuf, frites, très bon, mais je vais constater rapidement que c’est lourd et difficile à digérer. Trans-sur-Erdre, village mort, un panneau d’affichage n’affiche rien. La mairie, la Poste, le commerce, tout est fermé. Pas de quoi se mettre en transe. Avant Mouzeil, un ruisseau dont l’eau est blanche comme si on y avait jeté du lait ou de la farine. Une belle pollution, originale.

Le centre de Mouzeil, avec son bar

Pause à Mouzeil, village charmant, propre. Je souhaite m’installer là pour la soirée et la nuit. Il n’y a pas de chambres d’hôtes, Ancenis est à 15 kilomètres. Allez, je me lance. À Ancenis, je trouverai hôtel, pharmacie, TV, pour le match PSG-Barcelone. Les deux ampoules au pied droit ne sont pas d’accord, elles se plaignent, je les comprends. Je ne les ai pas vraiment consultées avant de prendre cette décision. Je suis parti pour une bonne quarantaine de kilomètres dans la journée. Peut-être que j’en veux un peu trop. Effectivement.

A Couffé, devant l’hôtel-restaurant promis par les panneaux publicitaires, je constate amèrement qu’il est fermé, bien fermé. Les bras m’en tombent, les pieds aussi. Coup terrible au moral, je craque. Un automobiliste me transporte à Ancenis, les cinq derniers kilomètres en voiture, avec un jeune de 30 ans, très sympathique, menuisier habitant Oudon. On discute dix minutes et on se quitte en parlant patrimoine, restauration. Dix minutes au lieu d’une heure à pied, quelle belle invention la voiture.

Catherine s’inquiète de me savoir coucher en pleine nature, aussi ce soir je m’installe à l’hôtel, quel confort, moquette, douche, double-vitrage, pas de bruit. Au restaurant, je découvre la convivialité, un excellent Gamay et un Malvoisie du domaine des Galloires, à Drain. Demain je passerai à proximité, à Liré. Mais pas question de se charger, même avec une petite caisse, je reviendrai en voiture. Finalement je ne regarde que la première mi-temps du match, déjà 2-0. Le sommeil m’appelle. Une bonne nuit réparatrice est nécessaire.


Voir et savoir

  • Abbaretz,44 : Le site de la mine d’étain, un terril haut de 121 mètres. La tombe du chanoine Amédée Guillotin de Corson, 1837-1905, historien français, spécialiste de l’histoire de la Bretagne.
  • Notre-dame-des-Langueurs : Piéta. Sculpture du nantais Jean Fréour.
  • Joué-sur-Erdre : En 1487, le roi Charles VIII et Anne de Beaujeu campent avec leurs troupes. Durant la Sainte Union, en 1592, 12 000 Français et Espagnols commandés par le duc de Mercœur séjournent à Joué-sur-Erdre et Nort-sur-Erdre. Pour déjouer le blocus anglais les travaux du canal de Nantes à Brest commencent en 1811. Le réservoir du lac de Vioreau est creusé par des prisonniers espagnols. Le barrage est érigé en 1835. Le canal ouvre à la navigation le 1er janvier 1842. En 1605, la Roche-en-Nort devient propriété d’Henri de la Trémoille, baron de la Roche-en-Nort. Contre 40 000 livres, il la vend le 25 février 1626, à Louis de Rohan, prince de Guémené, époux d’Anne de Rohan.
  • Trans-sur-Erdre : Le pont du Theil contribuera à l’essor de la commune.
  • Couffé : Lieu de naissance de François-Athanase Charette de la Contrie en 1763. Il meurt fusillé en 1796.
  • Ancenis : La Pierre Couvretière, allée couverte. Son nom viendrait de la tribu des Andécaves, cependant le territoire d’Ancenis appartient à la civitas des Namnètes. La cité est bâtie en 984 sur une île, par Guérech, fils d’Alain Barbetorte, duc de Bretagne, ou par sa femme Aremberge. Les ducs d’Anjou, en 987, assiègent la ville. Elle fait partie des Marches de Bretagne. A Auray, le dimanche 27 septembre 1364, Guillaume d’Ancenis est tué aux côtés de Bertrand du Guesclin. Le pont mesure 412 m de long. Statue de Joachim du Bellay, par Adolphe Léonfanti.

Ma collection de tampons

  • Boulangerie-pâtisserie Grelier : 4, rue de l’Église. 44170. Abbaretz.
  • Auberge du Lion d’Or : 21, rue du Bocage. 44440. Joué-sur-Erdre.
  • Le BDM : Bar, tabac, restaurant. 44850. Mouzeil.