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De Flers à Villedieu-les-Poêles

16 mai 2024

Bertrand du Guesclin prend Tinchebray en 1378. Il s’empare de Vaudry et la Herbellière, à l’est de Vire, en 1363.

Je veux être de retour ce week-end, je dois écourter mon périple. Objectif du jour : rejoindre Villedieu-les Poêles. C’est à 55 kilomètres, il va falloir user d’autres moyens que les chaussures.

A la gare je constate qu’il n’y a pas de train ou de car pour aller à Tinchebray dans les heures qui viennent. Il faut trouver un chauffeur. Je contourne le château pour retrouver la départementale qui mène à Tinchebray.

Flers. 61

J’entre dans un bar, commande un café, et demande s’il y aurait quelqu’un qui irait vers Tinchebray. Un monsieur me dit que c’est possible. La réponse est ambigüe.

Ce monsieur est retraité, il a travaillé dans l’industrie. Finalement il m’explique qu’il n’avait pas prévu d’aller à Tinchebray, mais que ce sera sa bonne action du jour. Il me parle de ses démêlés avec ses enfants, de ses relations professionnelles. Arrivés à Tinchebray, je lui offre un café. Une belle rencontre. Merci.

Tinchebray est à 14 km à l’ouest de Flers et à 16 km au sud-est de Vire. Elle est traversée par le Noireau.

Je parcours la ville.

Tinchebray. 61
Ancienne prison royale, transformée en musée.
Tinchebray. 61
Ancienne prison royale, transformée en musée.

André Breton est né le 19 février 1896 à Tinchebray et mort le 28 septembre 1966 à Paris 10e. Il est le principal animateur et théoricien du surréalisme.

Tinchebray. 61
Tinchebray. 61

C’est à l’issue de la bataille de Tinchebray, le 28 septembre 1106, qui se déroule sous les murs du château, que Henri Ier Beauclerc, roi d’Angleterre vainc son frère Robert Courteheuse, duc de Normandie, entraînant à nouveau le rattachement du duché de Normandie à l’Angleterre, dix-neuf ans après le partage entre les fils de Guillaume le Conquérant. La seigneurie de Tinchebray est rattachée au domaine royal en 1259. 1

Tinchebray. 61
Tinchebray. 61

« En 1378, Duguesclin, à la tête d’une troupe de soldats français, pénétrait dans le comté de Mortain, s’emparait de Tinchebray, d’où il chassait les Navarrais, et conseillait au roi de France, Charles V, de raser cette forteresse qui avait trop longtemps servi de repaire aux pillards à la solde du Mauvais.§ 98.

« Aussi, à la date du 9 août 1380, un ordre du roi Charles V prescrivait à Guillaume d’Enfernet, bailli du Cotentin, de faire démolir le château aux frais et dépens des habitants du pays, « par telle manière qu’il n’y demeure chose par quoi l’on puisse ramener la dite place à nulle forteresse et qu’aucun péril et dommage ne s’en pût suivre à nous ni au pays ». « L’exécution suivit de près l’ordre royal, car, dès le 4 septembre de la même année, la solde de la main-d’œuvre employée à ces travaux de démolition était ordonnancée par Guillaume d’Enfernet, en vertu d’une injonction faite à Thomas Le Quelnie, receveur général des finances ; pour six journées de travaux à l’abattement des forts les ouvriers reçurent une somme de deux sous six deniers par jour. 2

Le château féodal est détruit en 1378 sur le conseil de Duguesclin, pour anéantir l’influence anglaise dans la région. Malgré le rattachement à la couronne en 1335, les habitants de Tinchebray sont longtemps sous la domination des comtes de Mortain et des Anglais. 3

Je rate la chapelle Saint-Rémi, d’origine romane, ancienne église castrale, fortifiée pendant la guerre de Cent Ans. Construite aux alentours de 1350, il y figure des fresques XIVe siècle. Je ne vais pas rechercher les vestiges du château. Je devrai revenir. 4

Un monsieur me dépose avant Vire au carrefour qui mène à Roullours. Je suis maintenant dans le Calvados.

Roullours. 14

Roullours est entièrement dans le bassin de la Vire qui délimite le territoire du sud à l’ouest. Le fleuve côtier naissant prend des allures de torrent dans le site des cascades de Roullours. Seigneurie de Richard de Rollos, chambellan de Guillaume le Conquérant, au XIe siècle, Rollos reste possession de sa descendance jusqu’au XIVe siècle. 5

Roullours. 14
L’église Saint-Martin (XVIIe siècle).
Vaudry. 14

J’arrive à Vaudry. Je me rends à la mairie, un jeune homme fort sympathique me situe le château du Pont de Vaudry et La Herbellière. Ce sont des propriétés privées éloignées du centre du bourg. Je remets ma visite à une prochaine fois.

Après le désastre de Poitiers en 1356, La Basse-Normandie est envahie par les Anglais. Le Pont-de-Vaudry est occupé par un détachement navarrais. En 1363, Du Guesclin est obligé de mener l’assaut à la Herbellière et au fortin du Pont-de-Vaudry. 6

Vaudry. 14
Église Saint-Martin. (XVIIe siècle).

Une assistante médicale me conduit à Vire. Merci.

Je tombe sur un bureau de La Manche Libre. Je raconte au journaliste qu’un des ses collègues a fait un papier. Il me propose d’en faire un autre. Pourquoi pas ? Merci.

Vire. 14

Vyre en 1371.Vire fut de tout temps constamment fortifiée : camp préhistorique, oppidum gaulois, motte féodale entourée d’une palissade sous Guillaume le Conquérant, éperon barré par un robuste donjon carré à contreforts œuvre d’Henri Ier Beauclerc, isolée par une double enceinte au XIVe siècle flanquée de tours circulaires.

L’enceinte urbaine, précédée par un fossé large d’environ sept mètres et profond de cinq, se rattachait aux fortifications du château. Elle était flanquée de six grosses tours à mâchicoulis et s’ouvrait vers l’extérieur par quatre portes dont les trois principales étaient protégées par deux tours avec herses et pont-levis (porte de Martilly ou Saint-Jean, porte de l’Horloge, porte Saint-Thomas).

Le 13 juillet 1367 un mandement de Charles V témoigne de la fortification de la ville, « […] à ses biens aimés bourgeois habitants de la ville de Vire » leur accordant la remise d’une partie de leurs impositions pour « […] la fortification de la dite ville, et pour les aider à la garder »

Vire est pillée en 1368 par les Grandes compagnies.

1368. Guillaume du Merle négocie en août le rachat de Vire occupée par les Grandes compagnies, en concertation avec le maréchal Mouton de Blainville. 7

Guillaume du Merle fait partie des négociateurs. Le roi Charles V ratifie le rachat de Vire le 3 septembre à Paris. :

Il importait beaucoup qu’après le pillage de cette ville, on empêchât les Grandes Compagnies de pénétrer davantage dans la basse province, le Roi envoie Mouton de Blainville, Maréchal de France, pour se concerter avec Guillaume du Merle, et arrêter ces troupes...mais comme ils n’avaient pas de forces suffisantes pour les repousser, il fallut le faire à prix d’argent. On négocia donc avec quatre de leurs chefs... 8

Le 6 juin 1944 vers vingt heures, comme beaucoup d’autres villes normandes, Vire subit les bombardements stratégiques alliés, elle est détruite à plus de 95 %. 9

Vire. 14
La porte Horloge, façade occidentale.

Je fais une petite pause-omelette-andouille à la brasserie Le Central.

Vire. 14
Église Notre-Dame de Vire des XIIIe, XIVe, XVe et XVIe siècles.
Vire. 14
Église Notre-Dame de Vire des XIIIe, XIVe, XVe et XVIe siècles.
Vire. 14
Église Notre-Dame de Vire des XIIIe, XIVe, XVe et XVIe siècles.
Vire. 14
En arrière-plan, le donjon roman d’Henri Ier Beauclerc.
Vire. 14
Église Notre-Dame de Vire des XIIIe, XIVe, XVe et XVIe siècles.
Vire. 14
Église Notre-Dame de Vire des XIIIe, XIVe, XVe et XVIe siècles.
Vire. 14
Église Notre-Dame de Vire des XIIIe, XIVe, XVe et XVIe siècles.

La chapelle la plus imposante se trouve dans le transept sud, dédiée à St Michel, elle est bâtie au XIVe siècle par un riche seigneur Virois, Richard d’Enfernet, vicomte de Vire, proche du roi Charles V et de Bertrand du Guesclin, il assura la défense de Vire face aux Anglais. 10

Richard d’Enfernet (Amphernet) seigneur de Tracy, sert le 1er août 1371, en qualité d’écuyer, dans la compagnie de Bertrand Duguesclin, connétable de France. 11

Vire. 14

Je passe à l’Office de Tourisme. Je vais à la gare, 1/2 heure d’attente pour 3 clients. On ne s’énerve pas, cool. En 17 minutes je suis à Villedieu-les-Poêles, dans la Manche. Là, aucun panneau n’indique la direction du centre-ville.

Villedieu-les-Poêles. 50
La descente de la gare vers le centre-ville.

Villedieu-les-Poêles est dans la vallée. Je trouve une chambre à l’hôtel Le Fruitier.

Villedieu-les-Poêles. 50
De l’ardoise partout.

Parrochia de Villa Dei en 1332, Villa Dei de Saltu Caprioli au XIVe siècle7, la parroche de Villedieu de Chauchevrol en 1344. Je me balade en ville, du cuivre partout.

Villedieu-les-Poêles. 50
Église Notre-Dame des XIIIe, XVe – XVIIe siècles, en granit.

Terroir appartenant à l’origine à l’abbaye aux Dames de Caen, il n’existait pas de paroisse de Villedieu avant le premier tiers du XIIe siècle. Villedieu était alors une partie de la paroisse de Saultchevreuil appelé Siennestre. En 1130, le roi d’Angleterre et duc de Normandie Henri Ier Beauclerc donne quatorze acres en un lieu nommé Siennêtre aux Hospitaliers de l’ordre de Saint-Jean de Jérusalem, pour édifier leur commanderie de Villedieu-les-Saultchevreuil (anciennement Saucherelle). Ces derniers y fondent un village, Villa Dei, qui devint Villedieu. La ville fut longtemps administrée directement par l’Ordre et les habitants ne payaient pas d’impôts. 12

Villedieu-les-Poêles. 50
Église Notre-Dame des XIIIe, XVe – XVIIe siècles, en granit.

La petite giboulée de chaque soir est au rendez-vous.

Je mange au restaurant de l’hôtel. A peine assis, une jeune femme me demande : quel est votre numéro de chambre ? C’est plutôt équivoque, non ? Presque du harcèlement ! Cette question reviendra demain au petit déjeuner, une obsession !

Rebelote pour de l’andouille.

Une petite journée à 10 kilomètres.